L’Aigle, reine des airs, avec Margot la pie,
Différentes d’humeur, de langage, et d’esprit
Et d’habit,
Traversaient un bout de prairie.
Le hasard les assemble en un coin détourné.
L’Agasse eut peur, mais l’Aigle, ayant fort bien dîné,
La rassure, et lui dit : « Allons de compagnie :
À Monseigneur le duc de Bourgogne
Un Chat, contemporain d’un fort jeune Moineau,
Fut logé près de lui dès l’âge du berceau :
La cage et le panier avaient mêmes pénates.
Le Chat était souvent agacé par l’oiseau :
L’un s’escrimait du bec, l’autre jouait des pattes.
Laridon et César, frères dont l’origine
Venait de chiens fameux, beaux, bien faits et hardis,
À deux maîtres divers échus au temps jadis,
Hantaient, l’un les forêts, et l’autre la cuisine.
Ils avaient eu d’abord chacun un autre nom ;
Mais la diverse nourriture
Fortifiant en l’un cette heureuse nature,
Capitaine Renard allait de compagnie
Avec son ami Bouc des plus hauts encornés.
Celui-ci ne voyait pas plus loin que son nez ;
L’autre était passé maître en fait de tromperie.
La soif les obligea de descendre en un puits.
Là chacun d’eux se désaltère.
Après qu’abondamment tous deux en eurent pris,
Bertrand avec Raton, l’un Singe, et l’autre Chat,
Commensaux d’un logis, avaient un commun Maître.
D’animaux mal-faisans c’était un très-bon plat ;
Ils n’y craignaient tous deux aucun, quel qu’il pût être.
Trouvait-on quelque chose au logis de gâté ?
L’on ne s’en prenait point aux gens du voisinage.
Un cerf s’étant sauvé dans une étable à bœufs
Fut d’abord averti par eux
Qu’il cherchât un meilleur asile.
« Mes frères, leur dit-il, ne me décelez pas :
Le bon coeur est chez vous compagnon du bon sens
Avec cent qualités trop longues à déduire,
Une noblesse d’âme, un talent pour conduire
Et les affaires et les gens,
Une humeur franche et libre, et le don d’être amie
Malgré Jupiter même et les temps orageux.
Tout cela méritait un éloge pompeux :