L’Âne et ses Maîtres
L’Âne d’un jardinier se plaignait au Destin
De ce qu’on le faisait lever devant l’aurore.
« Les coqs, lui disait-il, ont beau chanter matin ;
Je suis plus matineux encore.
L’Âne d’un jardinier se plaignait au Destin
De ce qu’on le faisait lever devant l’aurore.
« Les coqs, lui disait-il, ont beau chanter matin ;
Je suis plus matineux encore.
Ne forçons point notre talent,
Nous ne ferions rien avec grâce :
Jamais un lourdaud, quoi qu’il fasse,
Un homme vit une Couleuvre.
Ah ! méchante, dit-il, je m’en vais faire une œuvre
Agréable à tout l’univers.
À ces mots l’animal pervers
(C’est le serpent que je veux dire,
Et non l’homme, on pourrait aisément s’y tromper.)
À ces mots le serpent se laissant attraper
De la peau du Lion l’Âne s’étant vêtu,
Était craint par tout à la ronde ;
Et bien qu’animal sans vertu,
Il faisait trembler tout le monde.
Il ne se faut jamais moquer des misérables :
Car qui peut s’assurer d’être toujours heureux ?
Le sage Ésope dans ses fables
Nous en donne un exemple ou deux.
Celui qu’en ces vers je propose,